Ce style est apparu dans la première décennie du XX° siècle, et a connu son apogée vers 1940. Il a alors pris parfois le nom de Estilo Villa Urquiza, du nom du quartier où ce style était largement majoritaire.
    Il se répand à Buenos Aires avec le retour des danseurs, venus de Paris juste avant la première guerre mondiale. En effet, à Paris, le tango a été aménagé pour s'adapter aux moeurs de la haute société qui ne pouvait accepter le tango canaille des origines. Et c'est sous cette forme qu'il a pu pénétrer dans la haute société argentine, friande des modes parisiennes.
    Les promoteurs de ce style ont été les riches Argentins de passage à Paris, mais surtout des danseurs comme Casimiro Aín qui a été professeur de tango à Paris entre 1913 et 1920, année durant laquelle il a gagné le championnat mondial de danses modernes à Paris. Il a enseigné à toute la haute société parisienne et, lors de son retour à Buenos Aires pendant la guerre, puis après son nouveau séjour parisien, il a transmis ce style à ses nombreux élèves.
    Comme autres danseurs qui ont développé ce style, on peut citer Juan Carlos Herrera, Alejandro Parodi, Bernabé Simarra " El Indio ", Ovidio Bianquet " El Cachafaz ", José Giambuzzi " El Tarila ", etc.

     De nombreux témoignages de l'époque relèvent cette différence entre le tango argentin des origines et le tango adapté par les professeurs en France et adopté par la haute société parisienne, puis argentine.
- Le président Clémenceau ( Notes de voyage ) : " ...le vrai tango dans l'antique impudeur de sa naïveté [...] est en train de perdre ses derniers caractères dans la désolation d'une monotonie civilisée. Le tango s'en va."
- La revue argentine P.B.T. du 7 février 1914 : " Ils l'ont adapté en lui retirant toute sa saveur. [...] Face à ce tango nouveau, celui de nos perigundines [...] n'est plus qu'une antiquité à côté des petits pas gracieux..."
- Le journal argentin El Diario : " Les Parisiens n'admettent comme tango argentin que celui qu'ils ont inventé...".
    Ces documents, et beaucoup d'autres, permettent de dire que le tango qui s'est introduit comme danse dans la haute société d'Argentine, puis qui a diffusé dans toutes les classes sociales, s'il a bien comme origine le tango canaille des bas-fonds, c'est en fait une danse qui a été adaptée et " civilisée " par son passage à Paris juste avant la première guerre.
   Et l'héritier direct de ce style est ce que l'on a appelé le style tango salon ( à ne pas confondre avec le " tango de salon " européen, qui résultera des normalisations académiques de l'entre-deux guerres, qui s'apprend dans les écoles de danse traditionnelles, et qui se pratique dans diverses compétitions.)

     C'est le prolongement naturel du style Salon original.
     Les meilleurs danseurs de ce style ont été Ramón Ribero " Finito " et Pedro Alberto Ruscini " Tete ".

     Ce style de tango était populaire dans le quartier de Villa Urquiza au cours des années 1940 et 50. Comme toujours en tango, les choses évoluent, mais on peut dire que le style Villa Urquiza est caractérisé par une élégance, une finesse et une grande précision dans  la marche toujours glissée au ras du sol.  La posture est un peu plus droite que celle du style dit "milonguero" ce qui n'empêche pas que les échanges dans le couple se fassent aussi par les bustes. L'abrazo (étreinte) est fermé pendant la marche, mais peut être plus ouvert pour ochos et tours. On y trouve toutes les combinaisons et figures diverses (sacadas, arrastres, boleos ...) mais pas de ganchos, volcadas et colgadas. [...]

     A ce jour, les milongas les plus connues dans le quartier Villa Urquiza sont : Club Pinocho, Sin Rumbo, et le Club Sunderland ou l'enseignement est centré sur le style Villa Urquiza.